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L’existence ou non de risques psychosociaux dans le cadre d’un PSE reste de la compétence du juge judiciaire

Si depuis plusieurs années, le juge administratif s’est vu attribuer la compétence du contentieux relatif aux plans de sauvegarde de l’emploi, le juge judiciaire n’a pas été totalement dépossédé aux yeux de la Cour de cassation. Il conserve ainsi la compétence du contrôle d’éventuels risques psychosociaux causés par une restructuration accompagnée d’un PSE.

Compétence de principe du juge administratif dans les contentieux sur le PSE

En réformant le régime du licenciement collectif pour motif économique, la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 a transféré du juge judiciaire au juge administratif le contentieux relatif au plan de sauvegarde de l’emploi (PSE). Rappelons qu'un tel plan est obligatoire lorsqu'une entreprise d'au moins 50 salariés envisage le licenciement d’au moins 10 salariés sur 30 jours (c. trav. art. L. 1235-7-1 ; loi 2013-504 du 14 juin 2013, JO du 16).

Le conseil de prud’hommes, juge du contrat de travail, n’a pas, pour autant, perdu toute prérogative en matière de licenciement avec PSE. La Cour de cassation a déjà eu l’occasion de juger qu’il demeure notamment compétent pour apprécier le respect par l’employeur de l’obligation individuelle de reclassement (cass. soc. 21 novembre 2018, n° 17-16766 FSPBRI).

Dans une nouvelle affaire soumise à la Cour de cassation, le partage de compétences entre le juge administratif et le juge judiciaire concernant le contentieux relatif aux PSE se pose encore une fois.

Litige sur le contrôle des risques psychosociaux consécutifs à la mise en œuvre d’un projet de restructuration

Une société avait présenté un projet de réorganisation de son activité, destiné à harmoniser et simplifier ses processus de gestion informatique. Le projet s'accompagnait d'un PSE, compte tenu de la suppression prévue de 71 postes.

Ce projet a fait l’objet d'une première mesure d'expertise, à la demande du CHSCT, afin d’en évaluer les impacts sur la santé, la sécurité et les conditions de travail.

Malgré l’avis défavorable du CHSCT, un accord collectif majoritaire portant sur le PSE a été conclu et validé par la DIRECCTE.

Le CHSCT a alors voté le recours à une nouvelle expertise avec pour mission d’identifier des risques de facteurs psychosociaux en lien avec le projet.

L'expert ayant conclu à l'existence de risques psychosociaux, le CHSCT a déclenché une procédure d'alerte, saisi l'inspection du travail et assigné la société en référé devant le conseil de prud’hommes afin :

-qu'il soit constaté que celle-ci n'avait pas pris les mesures nécessaires pour préserver la santé des salariés ;

-qu'il lui soit ordonné, sous astreinte, de suspendre toute mise en oeuvre du projet.

Mais, le PSE ayant été conclu dans le cadre d'un accord majoritaire, l'appréciation d’éventuels manquements à son obligation de sécurité par l’employeur échappait, selon ce dernier, à la compétence du juge judiciaire.

C’est dans ce contexte que la Cour de cassation a été saisie et qu’elle a confirmé la décision d’appel qui avait tranché en faveur de la compétence du juge judiciaire.

La Cour de cassation tranche en faveur de la compétence du juge judiciaire

Tel que le rappelle la Cour de cassation dans sa décision du 14 novembre 2019, le tribunal administratif est seul compétent pour se prononcer sur (c. trav. art. L. 1235-7-1) :

-la décision du DIRECCTE de valider ou d’homologuer le PSE ;

-le contenu du plan ;

-les éventuelles injonctions du DIRECCTE ;

-la régularité de la procédure de consultation.

Après avoir rappelé l’étendue des compétences du juge administratif tel que listés par le code du travail, la Cour de cassation en déduit que les demandes tendant au contrôle des risques psychosociaux consécutifs à la mise en oeuvre d’un projet de restructuration ne relevaient pas du champ de compétences de ce dernier.

En cas de litige sur ce sujet, c’est donc vers le juge judiciaire qu’il faut se tourner, cette liste étant visiblement limitative.

De fait, seuls les litiges spécifiquement énumérés échappent au juge judiciaire.

Comme le dit très clairement la cour d’appel pour motiver sa décision validée par la Cour de cassation : le code du travail n’autorise pas l’administration a procéder à d’autres contrôles que ceux prévus par la loi. Dès lors, il n'appartient pas à l'autorité administrative de contrôler les conséquences du PSE sur la santé et la sécurité des salariés.

Cass. soc. 14 novembre 2019, n° 18-13887 FSPB

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